Le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a suspendu l’exécution des travaux de destruction du barrage et de l’arrêté préfectoral déclarant d’intérêt général l’opération
Les faits :
Le Cusancin est un affluent du Doubs qui, sur le territoire de la commune de Baumes-les-Dames, supporte un barrage dérivant ses eaux pour alimenter un canal d’amenée vers un ancien moulin et l’usine dite « des pipes » fermée en 1991.
Ce barrage est la propriété de la commune de Baumes-les-Dames alors que le canal d’amenée, l’ancien moulin et l’usine sont la propriété de particuliers.
Souhaitant la destruction de ce barrage afin de rétablir la continuité écologique de la rivière, l’établissement public d’aménagement et de gestion des eaux Doubs Dessoubre (EPAGE) a déposé un dossier en préfecture lui permettant d’obtenir les autorisations nécessaires à savoir :
une déclaration « Loi sur l’eau » au titre des articles L. 214-1 et suivants du code de l’environnement ;
une demande de déclaration d’intérêt général au titre de l’article L.211-7 du code de l’environnement.
Par un arrêté du 30 avril 2024, le préfet du Doubs a déclaré d’intérêt général les travaux d’arasement du barrage et a donné son accord à la déclaration « Loi sur l’eau » déposée.
Les travaux de destruction ont démarré le 20 août.
Estimant que l’arasement du barrage porte une atteinte grave et manifestement illégale à leur « droit fondé en titre » d’usage de l’eau, les propriétaires de l’ancien moulin et de l’usine des pipes ont introduit le 20 août un référé-liberté devant le tribunal administratif de Besançon.
La décision du tribunal :
En application de l’article L. 521-2 du Code de justice administrative, lorsqu’une personne morale de droit public a porté dans l’exercice de ses pouvoirs une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, peut ordonner toute mesure nécessaire à la sauvegarde de cette liberté fondamentale.
En l’espèce, le juge des référés a estimé que les requérants apportaient la preuve de l’existence d’un « droit fondé en titre » d’usage de l’eau du Cusancin. Le « droit fondé en titre » n’est pas un droit de propriété de l’eau, mais un droit d’usage, attaché à la propriété du terrain. C’est donc un droit réel immobilier qui se transmet de propriétaire en propriétaire. La chose sur laquelle s’exerce le droit est la force motrice du cours d’eau.
Il a également jugé que les travaux en litige conduiraient à un assèchement du canal d’amenée d’eau à l’ancien moulin et l’usine des pipes et que cet assèchement aurait pour conséquence d’éteindre le « droit fondé en titre » des requérants.
Enfin il a estimé que les requérants ne pouvaient pas être dépossédés de ce droit réel immobilier sans leur accord ou, à défaut, qu’une procédure d'expropriation ait été menée à bien.
Par conséquent, il a ordonné la suspension des travaux d’arasement et de l’exécution de l’arrêté du 30 avril 2024.